energies renouvelables propres

« Le photovoltaïque est écologique, le nucléaire n’émet pas de CO2, l’hydraulique est une énergie propre… » On nous le rabâche en boucle. Pourtant, ces sources énergétiques ont aussi des impacts souvent ignorés. Toutes les alternatives au pétrole et au nucléaire ont des inconvénients. Ceci doit nous rappeler que toute forme d’énergie, propre ou sale, est précieuse.

Comment les énergies fossiles polluent

Le charbon, le pétrole et le gaz « naturel » ont déréglé notre climat et continuent à le faire. Pourquoi? Parce que le carbone accumulé dans le sol sur des centaines de millions d’années se retrouve en quelques dizaines d’années seulement propulsé dans l’atmosphère et les océans. Les répercussions sur la biosphère sont considérables: effet de serre, réchauffement, événements climatiques, acidification des océans, dérèglement des saisons, etc. Ce stock de CO2 ne pourra pas être stabilisé en quelques générations. Le mal est fait, et mieux vaut arrêter cette aberration écologique immédiatement pour ne pas empirer une situation déjà dramatique.

Le solaire photovoltaïque

Le soleil seul ne suffit pas à produire du courant. L’installation (capteurs, onduleur, compteurs, câbles, etc) nécessite d’abord des matériaux: métaux, plastique, silice, etc.

Avant de produire le premier kilowattheure « vert », il faut également une certaine quantité d’énergie grise, à savoir l’énergie nécessaire pour extraire les ressources, les transformer, assembler les composants, les emballer, les acheminer, les installer, puis traiter les déchets.

solaire: une énergie propre?

Par ailleurs, ils ont un rendement encore faible (15 à 20%) et dépendent totalement de l’ensoleillement, de ses variations quotidiennes (jour-nuit, météo) et saisonnières (été-hiver). Que faire de l’excès d’énergie produit un dimanche d’été à midi et quelle ressource complémentaire utiliser lorsque le soleil ne brille plus? Les dispositifs de stockage (batteries) sont eux aussi bourrés d’énergie grise et ont une durée de vie limitée. Enfin, le traitement des panneaux en fin de vie pose encore problème et demande lui aussi beaucoup d’énergie: démantèlement, transport, recyclage, etc. La « durabilité » des panneaux dépendra donc de leur durée de vie, de leur qualité de fabrication, de leur provenance et de leur raccordement ou non au réseau. En effet, la revente des kWh en excès permet d’amortir l’installation tout en évitant de devoir stocker (puisqu’elle est réinjectée sur le réseau) ou de gaspiller l’énergie produite en excès.

Le solaire thermique

Le solaire thermique est une solution plutôt low tech dont le potentiel est encore largement sous-estimé et a toute sa place dans une maison isolée. Cette énergie est plus simple dans son fonctionnement puisqu’il n’y a pas de conversion nécessaire comme pour le photovoltaïque, si ce n’est la transformation naturelle du rayonnement solaire en chaleur. Quand au stockage de l’énergie, il se fait dans un ballon d’eau bien isolé. Les fluctuations de l’ensoleillement sont moins gênantes grâce à l’inertie du stockage. Des solutions existent maintenant pour stocker l’énergie inter-saison, c’est-à-dire qu’on peut chauffer un bâtiment l’hiver avec l’énergie accumulée l’été, mais cela nécessite d’énormes accumulateurs en acier (voir jenni.ch). Le plus logique est donc de prévoir un stockage plus petit avec un chauffage d’appoint.

L’éolien

Les opposants à l’éolien brandissent les mort d’oiseaux (mais une éolienne tue chaque année autant d’oiseaux qu’un chat, et en tout cas bien moins que les baies vitrées des bâtiments), le bruit pour le voisinage, l’esthétisme et la pollution électromagnétique. De plus, la production éolienne est intermittente puisqu’elle dépend de la force du vent.

éolien: énergie propre?

Mais elle a l’avantage de produire plus en hiver, quand du courant « sale » (charbon, nucléaire) doit être acheté à l’étranger, améliorant ainsi l’autonomie énergétique du pays. Une éolienne tient peu de place au sol, ne rejette pas de CO2 à l’utilisation et est facilement recyclable (à part les pales).

Le courant électrique est produit par la rotation d’un rotor (les pales) autour d’un stator composés d’aimants permanents. Or, pour augmenter leur efficacité, certains aimants contiennent du néodyme, une « terre rare » extraite de mines chinoises dans des conditions humaines et environnementales accablantes et concentrée lors de procédés industriels énergivores. Heureusement, les éoliennes récentes n’en contiennent plus ou presque.

Le nucléaire

Souvent défini comme écologique du fait qu’il ne produit pas de CO2, le nucléaire est loin d’être exempt d’impacts environnementaux. D’abord il n’est pas renouvelable car l’uranium est une ressource limitée que l’on importe (Australie, Canada, Afrique, Asie Centrale). Nous dépendons donc des pays d’où il est importé. Pour être utilisable, l’uranium, présent dans la roche à des concentrations extrêmement faibles, doit être enrichi dans des centrifugeuses très énergivores. Encore cette fichue énergie grise!

L’énergie est produite par fission nucléaire: le noyau de l’atome d’uranium dégage de la chaleur en se cassant. La chaleur est ensuite convertie en vapeur puis en électricité grâce à des turbines, avec des rendements faibles (30 à 40%). En cas de dysfonctionnement, la fission peut rapidement s’emballer, faire fondre l’installation, et provoquer les catastrophes que l’on connait. N’est-il pas irresponsable de la part de nos dirigeants de se permettre le risque d’un accident nucléaire? Pour rappel, le coût de la catastrophe de Fukushima est estimé à 1000 milliards de dollars (les dépenses de l’Etat français sur 2 ans)?

Une centrale nucléaire est impossible à arrêter. Elle produit donc constamment, « en ruban », peu importe la demande. Le surplus produit la nuit ou les weekends est exporté ou utilisé pour du pompage-turbinage.

Enfin, le nucléaire reste peu cher car le prix du kWh n’inclut pas trois facteurs importants:

  • les coûts cachés dans nos impôts, puisque le programme nucléaire est largement subventionné par l’Etat: recherche, infrastructures, production, sécurité, traitement des déchets… (voir cet article)
  • le traitement des déchets radioactifs, toxiques et dangereux, dont nous ne savons toujours pas quoi faire après 60 ans d’utilisation. Un comble!
  • le démantèlement des centrales qui va coûter des dizaines de milliards.

Apprêtez-vous à passer à la caisse!

L’hydraulique (l’énergie des barrages)

L’énergie hydraulique convertit, grâce à une turbine, l’énergie potentielle de l’eau (à savoir son « poids » en bas d’une conduite forcée) en énergie cinétique et donc en électricité. Plus la hauteur entre la surface de l’eau et la turbine est élevée, plus on peut produire d’énergie.

Hydraulique: énergie propre?

Lorsque le relief le permet, ce qui n’est pas le cas de tous les pays, cette source d’énergie offre donc un bon complément au nucléaire. En effet, l’excédent d’électricité nucléaire est utilisé pour repomper l’eau de bas en haut, jusqu’au lac artificiel. Cette énergie stockée en altitude peut ensuite être réutilisée à la demande.

L’énergie hydraulique peut être activée quasi instantanément et donc s’adapter à la demande, notamment aux heures de pointe et pour lisser les pics de production photovoltaïque. Cependant, l’eau est moins disponible en hiver, là où la demande en électricité est plus forte, car elle s’accumule sous forme de neige et n’est disponible que lors de la fonte des neiges.

La construction de barrages requiert beaucoup de ciment. Or, la fabrication du ciment est très énergivore (puisqu’il faut brûler la roche calcaire) et émet 5% des émissions mondiales de CO2. Notons que le risque de rupture des barrages, par exemple en cas de séisme, n’est pas nul et peut potentiellement dévaster des régions entières.

Toutefois, la petite hydraulique au cours de l’eau offre un impact moindre sur le paysage, et surtout un fort potentiel puisqu’il est possible de produire de l’électricité avec une chute d’eau d’un ou deux mètres. D’autres installations exploitent l’énergie des fleuves et des marées.

La biomasse

Historiquement, c’est l’énergie la plus ancienne puisqu’on utilise le bois pour se chauffer depuis la Préhistoire. Si un feu dans une cheminée ouverte est très peu efficace, il existe aujourd’hui des poêles et chaudières ayant un excellent rendement énergétique, tout en réduisant les émissions de particules fines.

Pour autant que le bois provienne de forêts locales et gérées durablement, le CO2 issu de la combustion peut être réabsorbé par la végétation via la photosynthèse. La boucle est donc fermée et le bilan CO2 est considéré comme « nul ».

Bois: énergie propre?

La biomasse peut aussi être valorisée grâce à la méthanisation qui permet de capter le méthane issu de la dégradation anaérobique des déchets végétaux (compost, déchets agricoles, etc.) pour produire du biogaz.

La géothermie et l’aérothermie (PAC)

Intéressante sur le principe (on compresse les calories présentes dans le sol ou l’air pour se chauffer), la géothermie est toutefois encore très gourmande en électricité. Le fonctionnement d’une pompe à chaleur est similaire à un frigo: le fluide doit subir plusieurs opérations (compression, condensation, détente, évaporation), et il faut pour cela investir 1kWh d’énergie pour en récupérer 3 à 4 dans l’environnement. Il s’agit donc d’un chauffage électrique amélioré. Concernant la géothermie, elle n’est pas possible partout du fait de la législation et du potentiel limité. Pour les pompes à chaleur air-eau, leurs coefficients de performance sont moins bons en hiver lorsque la température est basse car il est plus difficile de capter des calories dans un air glacé.

L’hydrogène

Vanté pour ne rejeter que de la vapeur d’eau, on parle moins de sa fabrication, aujourd’hui extrêmement énergivore. De plus son stockage est très coûteux, complexe et dangereux. L’hydrogène pourra à l’avenir servir au mieux de moyen de stockage pour absorber les excès de production d’autres sources (nucléaire, solaire, éolien). Mais imaginer des camions et avions propres tournant à l’hydrogène est à ce jour illusoire.

Existe-t-il une énergie propre?

Il est aujourd’hui assez facile de produire de la chaleur de façon écologique (solaire thermique, bois, etc.) mais produire de l’électricité coûte cher, écologiquement parlant. Il s’agit donc de la consommer avec modération, et en ayant consciences de ce crédit que nous offre la Terre.

L’énergie la plus propre est celle que l’on ne doit pas produire. L’enjeu des prochaines décennies sera de trouver le mix idéal entre ces différentes sources, tout en réduisant drastiquement nos besoins. C’est ce que propose le plan Négawatt, basé sur la diminution de la consommation d’électricité, la réduction des besoins inutiles (par exemple l’éclairage des vitrines la nuit) et l’optimisation de l’efficacité énergétique (isolation, rendements améliorés, éclairage LED) sans tomber dans les effets pervers de l’effet rebond.

Les énergies renouvelables ont clairement leur lot d’avantages comparées aux énergies fossile et nucléaire. De là à dire qu’elles sont écologiques semble un raccourci un peu rapide. Développer un mode de vie plus sobre est certainement la meilleure chose que l’on puisse faire.


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