Crise de coronavirus: quels avantages ?

Voilà un trouble-fête que personne n’attendait. En quelques semaines, le COVID-19 a paralysé la planète entière. Bien sûr, il y a les pertes humaines et financières, la solitude, le doute, la peur qu’on lit à longueur de journée dans les médias. Plutôt que d’alimenter la névrose, je propose ici de relever les nombreux avantages du coronavirus.

coronavirus avantages

1. Mobilisation. Nous avons la preuve qu’un ralentissement global, rapide et coordonné est possible à l’échelle planétaire. Cette mobilisation sans précédent a uni tous les gouvernements derrière une même cause: sauver l’Humanité. Cet argument ressortira sans doute lorsque nous devrons traiter la question du climat. Si en quelques semaines nous avons trouvé les moyens d’agir contre le COVID-19, pourquoi n’avoir rien fait depuis le sommet de Rio, le protocole de Kyoto, l’accord de Paris et toutes les autres jolies déclarations creuses?

2. Ralentissement. Les magasins sont fermés, le trafic limité, les événements annulés, nos vacances repoussées. A l’époque de l’illimité et de l’immédiateté, qui pensait voir cela arriver aussi vite?

3. Priorités. Tout le monde a eu l’occasion de réfléchir sur ce qui est nécessaire et ce qui est superflu, sur ce dont on peut se passer et ce qui nous manque. Est-ce que je pourrais vivre avec moins, consommer moins, travailler moins? Quels sont mes besoins essentiels quand tout est fermé et que je peux à peine sortir? Étonnamment, se torcher le cul est une priorité au même titre que se nourrir (ce qui doit bien faire rire les pays où l’on n’utilise pas de PQ).

4. Travail. Le chômage partiel nous permet de nous interroger sur l’utilité, le sens et la place de son travail dans sa vie. Une question que pose aussi le débat sur un revenu de base inconditionnel. Tiens, je ferais quoi de ma vie si un revenu minimum m’était assuré? L’Espagne met en place un revenu universel comme solution à la crise: et si c’était une solution définitive? Les indépendants, dont l’activité souffre, pourraient affronter les crises avec plus de sécurité et de sérénité si un revenu minimum leur était garanti. Et il n’y aurait presque plus besoin de distribuer des dizaines de milliards dans l’urgence.

5. Adaptation. Nous avons dû innover et trouver des solutions, que ce soit pour concilier famille et travail quand les écoles ferment, pour faire ses courses, pour travailler depuis la maison, pour trouver un nouveau rythme que ce soit seul ou avec sa famille, pour s’isoler lorsqu’on est confiné avec d’autres, pour s’occuper, pour continuer à vivre malgré tout. Et on fait avec ce qu’on a.

6. Rareté. Pour la première fois de notre vie, on expérimente la rareté, on se rend compte de la valeur d’une promenade, de notre famille, de nos relations, de la chance d’avoir un travail et un revenu, de ce qu’on possède, de la chance d’être vivant et en bonne santé.

7. Prendre le temps. Nous avons pu faire des choses qu’on ne faisait jamais auparavant par manque de temps : jardiner, courir, se poser, vivre! Mais que faisait-on avant? On faisait les magasins, on courait après toute sorte d’activité et de loisirs pour passer le temps, et on se plaignait de ne jamais avoir le temps. Maintenant on l’a.

8. Sens de la vie. On se rend compte qu’on est vulnérable, mortel, et donc que notre vie a peut-être une autre finalité que celle de travailler pour vivre et de vivre pour travailler, de consommer à outrance et d’accumuler à en crever. Quelles sont les priorités dans ma vie? Mon travail, ma famille, mes vacances, l’argent, mon développement personnel?

9. Transition. Cette prise de conscience planétaire devrait accélérer le virage vers une société sobre amorcé en 2018 par Greta Thunberg. Je ne vois pas quelle autre alternative nous avons de toute façon si l’on veut préserver l’espèce humaine. Toute autre stratégie est vouée à l’échec, tôt ou tard. Cela va se faire doucement, mais sûrement. Cette crise sanitaire n’est malheureusement qu’un avant-goût des restrictions que nous vivrons de gré ou de force dans les prochaines décennies.

10. Mondialisation. Nous nous rendons compte (enfin) de ce qu’est la société globalisée: une dépendance extrême envers l’étranger (notamment la Chine), que ce soit pour nos masques, nos désinfectants, notre matériel médical, nos médicaments, mais aussi pour nos vacances, nos biens de consommation, nos téléphones… Et si on relocalisait notre nourriture, notre industrie, notre savoir-faire?

11. Vulnérables. Nous pensions les pandémies d’autrefois terminées (peste, lèpre, malaria, tuberculose et j’en passe), mais la nature évolue, s’adapte et trouve toujours un moyen de réguler la population, de sélectionner les plus résistants, de rétablir un juste équilibre.

12. Mère Nature. L’homme n’est pas supérieur à tout. Il y a un ordre des choses, des lois naturelles, une logique des choses. L’Homme n’est ni invincible ni immortel. Malgré les quarantaines, les mesures, la panique, les recommandations, les fermetures, la Nature sait nous recadrer.

13. Système hospitalier. Le confinement a été avant tout organisé pour permettre au système hospitalier de suivre, car celui-ci a ses limites: manque de lits, de matériel, d’antiseptique, de personnel qui peut lui aussi tomber malade. Et quand les limites sont atteintes, il faut prioriser l’utilisation du matériel et sacrifier certaines personnes.

14. Vieillissement. Ce point est un bon sujet de polémique, mais en France, un tiers des victimes ont lieu dans des maisons de retraites. A l’heure où le vieillissement de la population pose des problèmes de financement des retraites, de place dans les établissements, d’isolement des personnes âgées, de leurs conditions, de l’acharnement de la médecine à les maintenir en vie le plus longtemps possible à grand renfort de médicaments, le COVID aura, d’une certaine manière, posé certaines questions. Espérons qu’il fasse réfléchir sur la place des anciens dans la société.

15. Écologie. L’environnement est le grand gagnant. En quelques jours, le virus en a fait bien plus qu’en 40 ans de diplomatie internationale. Lorsque l’économie ralentit, les émissions baissent et la nature reprend ses droits. Les zones industrielles (comme en Chine) voient à nouveau le bleu du ciel. Les lieux touristiques (comme à Venise) respirent à nouveau. Dans certains endroits, le chant des oiseaux prend à nouveau le dessus sur le bruit des routes.

16. Transports. Alors qu’en février, nous étions encore dans les embouteillages ou dans des trains bondés, les rues sont désertes et les trains vides. Nous disposons de beaucoup de moyens pour limiter les déplacements polluants et chronophages: télétravail, télé-médecine, cours à distance, etc. Saisissons ces opportunités pour plus d’efficacité.

17. Avion. Le secteur de l’aviation est un des grands perdants et c’est tant mieux car il est responsable d’un vingtième des émissions de CO2 à l’échelle mondiale. Il est donc temps de revoir notre copie et de relocaliser nos vacances et notre production de biens. Doit-on vraiment sauver un secteur aussi polluant lorsque le kérosène n’est toujours pas taxé?

18. Bonheur. La course à la croissance prend du plomb dans l’aile. Pourtant, la vie continue, et cette pause a du bon. Qui, pendant ce confinement, n’a pas trouvé que cette crise avait du bon, que ralentir était positif, qu’avoir le temps de ne rien faire pouvait aussi être cool. La réussite de la société, basée uniquement sur la croissance du PIB, ne devrait-elle pas prendre en compte d’autres paramètres? A quand un indice de Bonheur National Brut?

19. Santé. Le COVID-19 nous questionne encore et toujours: vais-je le choper, voire en mourir? Et si ma famille était contaminée? Quel est mon état de santé? Comment renforcer mon immunité? Ai-je une bonne hygiène de vie?

20. Liberté conditionnelle. Le confinement, l’isolement, la quarantaine nous montre que notre liberté sacrée est en fait limitée et conditionnelle et qu’elle ne sera plus comme avant. A l’avenir, les grands rassemblements, les déplacements non indispensables, seront remis en cause. Et certains gouvernements pourraient abuser de leur pouvoir: le coronavirus pourrait servir de prétexte pour mettre en place des mesures de surveillance de masse et des dérives totalitaires. Une bonne raison de revoir notre gouvernance et nos modes de scrutin?

Certes, le bilan de la crise n’est pas aussi rose selon notre profession, notre âge, notre sécurité financière, notre lieu de vie ou notre état de santé, mais ce coronavirus a en tout cas repoussé l’Humanité dans ses retranchements les plus profonds. C’est un fait!

Alors puisqu’on est dedans, autant voir le côté positif des choses. Oui, cette crise sanitaire est une chance, une opportunité formidable d’évoluer.


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légumes lacto fermentation

Légumes lacto-fermentés: un jeu d’enfant

Connaissez-vous la lacto-fermentation? Ce procédé est utilisé depuis des siècles pour conserver les aliments. Il existait bien avant les frigos et les congélateurs, bien avant les boites de conserves en métal, bien avant la stérilisation. En effet, préparer des légumes lacto-fermentés est très simple.

Il existe plusieurs types de fermentation, par exemple la fermentation alcoolique qui transforme le sucre en alcool, la fermentation fongique faisant intervenir des moisissures dans la fabrication de certains fromages, et d’autres que j’aborderai peut-être plus tard. Ce post se concentrera sur la lacto-fermentation, c’est-à-dire la transformation des sucres en acide lactique par des lactobactéries (bacille, coque), ce qui se fait en milieu anaérobie, c’est-à-dire privé d’oxygène.

L’exemple le plus connu de lacto-fermentation est la choucroute, dont le procédé fait intervenir 3 souches de bactéries différentes, présentent naturellement sur les choux, et qui travaillent à tour de rôle selon l’acidité, qui augmente petit à petit. Ça semble compliqué, et pourtant cela se produit naturellement. Tout le monde connait aussi les cornichons au vinaigre, même si ceux que l’on trouve dans les supermarchés sont juste des cornichons immergés dans un mélange d’eau, de vinaigre, de sucre et de sel, probablement pasteurisé, donc stérile, donc mort. A l’inverse, la lacto-fermentation conserve et nourrit des micro-organismes bénéfiques pour notre santé.

Les avantages

La lacto-fermentation présente de nombreux atouts:

  • Il n’y a aucun besoin d’énergie pour chauffer ou réfrigérer. Le milieu acide généré par les bactéries lactiques suffit à empêcher la prolifération d’agents pathogènes (E.coli, salmonelle, etc.), ce qui rend les légumes lacto-fermentés souvent plus sûrs que les légumes frais.
  • Les vitamines sont conservées, et même mieux: certaines vitamines (notamment B et K) sont synthétisées lors du processus, ainsi que des acides aminés, des anti-oxydants et des acides gras essentiels.
  • La fermentation fragmente les molécules complexes (protéines, glucides) en petits morceaux, ce qui rend les aliments ainsi conservés plus digestes, plus assimilables et donc plus nutritifs.
  • La présence des micro-organismes est bénéfique pour notre flore intestinale et notre métabolisme.
  • Le goût est amélioré par la synthèse de délicieux arômes.

Comment les déguster?

Il existe mille façons de déguster les légumes lacto-fermentés: entrée, encas, pickles en apéritif, dans un sandwich, ou en accompagnement de divers plats (fondue, viande, pizza, etc. avec tout en fait!) La choucroute, souvent consommée cuite, devrait plutôt se manger crue ou tout juste réchauffée (40-45°C max.).

Comment préparer les légumes lacto-fermentés?

Il existe 2 méthodes principales: l’une où les légumes râpés ou émincés sont conservés dans leur propre jus (comme la choucroute), et l’autre où la fermentation se fait dans une solution d’eau salée. Utilisez des bocaux avec joints et éviter les couvercles en métal qui se corrodent avec l’acidité. Remplissez-les jusqu’à 2-3 cm du bord, ni plus ni moins. Le matériel doit être très propre mais pas forcément stérilisé puisque les bactéries lactiques vont empêcher les pathogènes de se développer. Les légumes doivent être crus, de qualité bio, si possible ni lavés ni épluchés, et l’eau non chlorée (par exemple aérée en carafe une demi-journée).

Légumes émincés

Avec des légumes râpés ou émincés, le jus des légumes devrait suffire. Il faut pour cela les presser à la main ou avec un pilon en bois, avec une quantité de sel correspondant à 1% du poids de légumes, par exemple 5g de sel pour 500g de légumes, 10g pour 1kg, etc (1 cuillère rase de sel = 5g).

Laissez dégorger une heure, puis remplissez vos bocaux en tassant les légumes. Les légumes devraient exprimer suffisamment de jus pour être immergés. Si le jus ne suffit pas à couvrir les légumes, ajoutez un peu de saumure à 3% de sel (3g par dL d’eau). Et laissez fermenter (voir plus bas).

Recette de choucroute

Ingrédients: 1kg de chou lisse émincé + 10g sel + genièvre, laurier. Presser le chou salé pour extraire le jus, laisser reposer 1h couvert d’une assiette lestée. Presser à nouveau, puis remplir les bocaux en tassant bien. Le jus doit recouvrir les légumes. Ajouter à peine d’eau si besoin. Ajouter un poids en verre ou une feuille de chou entière pliée et ajustée pour maintenir les légumes immergés (facultatif). Fermer hermétiquement et laisser la magie de la fermentation opérer. Alternative: faites une choucroute de racine en utilisant des légumes racines râpés, seuls ou mélangés: carottes, betterave rouge, navet, etc.

Recette de sauce piment

100g de piments + 2 gousses d’ail + 10g sel (ici, la quantité de sel est supérieure). Laver, équeuter et couper le piment en tronçons de 5mm. Ajouter l’ail émincé et écraser le tout avec le sel dans un bol ou un mortier afin d’extraire le jus. Mettre en bocal et recouvrir d’une feuille de chou adaptée à la surface l’essentiel étant de garder le piment immergé dans son jus. Laissez fermenter.

Légumes en saumure

Lorsque les légumes sont entiers ou en morceaux, on les trempe dans une saumure préparée avec 25 à 30g de sel pour 1 litre d’eau. Le liquide doit toujours dépasser les légumes de 1cm. Vous pouvez fermenter presque tout: courge, fenouil, concombre, haricots, poivron, ail, et même des écorces de pastèque (la partie blanche seulement) ou des tiges de chou kale.

Enfin, assaisonnez selon vos envies: thym, aneth, laurier, graines de moutarde, de coriandre, de poivre, curcuma, gingembre.

Recettes de légumes en saumure

Voici quelques exemples de préparations parmi tant d’autres:

  • petits cubes (1 à 2 cm de côté) de courge + laurier, moutarde
  • bâtons de concombre + aneth, poivre
  • des pâquerettes, capucines, fleurs d’ail des ours, des baies de sureau vertes.
  • Fausses câpres: récoltez des boutons de fleurs de pissenlit, les débarrasser de leur tige et de leur barbule, et les mettre en bocal avec la saumure. Couvrir d’une rondelle de légume (carotte, céleri, feuille de chou…). Rien ne devrait dépasser du niveau d’eau.
  • Fausses olives: suivez la recette ci-dessus avec des prunelles (fruit de l’épine noire) pas trop mûres.

Durée de fermentation

Dans les deux cas, la fermentation se fait en 2 étapes:

  • 1 semaine à température ambiante (20°C). En été, cette étape peut être raccourcie d’un à trois jours selon la température. Attention, du gaz va se former, prévoyez donc une assiette sous le bocal au cas où ça déborde.
  • 1 mois au minimum à moins de 18°C: cave, garage, véranda, peu importe. La fermentation ne craint pas le froid tant qu’il ne gèle pas. C’est juste qu’elle sera ralentie, il faut donc la laisser plus longtemps (par exemple 3 mois au frigo). Le tout doit se dérouler dans un endroit sec et pas trop lumineux.

Il est préférable de consommer vos légumes dans les 3 mois, mais vous pouvez les garder plus longtemps. Surveillez régulièrement.

« J’ai peur de me lancer »

Il y a peu de risque de se louper si vous vous fiez à vos sens. Un goût acide, légèrement pétillant sont des bons signes. Le dépôt au fond, constitué de levures, est une invitation à ne pas trop attendre avant de consommer. La préparation peut être oxydé / légèrement brunie en surface, ce n’est pas grave. S’il y a une fine couche de moisi en surface, enlevez-la à la cuillère et essuyez les bords avec un chiffon imbibé de vinaigre. Si l’odeur ou l’aspect est vraiment douteux, ne prenez pas de risque, recommencez.

Pour augmenter vos chances de réussite (mais tout ce qui suit est facultatif), vous pouvez:

  • mettre un poids sur vos légumes pour s’assurer qu’ils soient bien immergés,
  • associer plusieurs légumes plutôt qu’une seule sorte, pour équilibrer la fermentation et offrir une variété de nutriments aux bactéries. Par exemple, ajouter du chou aux légumes sucrés (carotte, betterave, courge) car ceux-si s’acidifient plus vite que les autres.
  • ensemencer votre bocal avec le jus d’une préparation lacto-fermentée précédente
  • ajouter des feuilles de chêne, riches en tanins, ou de raifort, cassis, framboisier, merisier, riches en micro-organismes utiles.

Pour aller plus loin

Vous pouvez utiliser les propriétés de la fermentation d’autres façons. Par exemple, le fait de laisser tremper les céréales (comme le riz complet, le quinoa, le sarrasin) avant de les cuire permet de digérer l’acide phytique des céréales, la saponine du quinoa.

Même chose pour les légumineuses (lentilles, pois chiches, haricots, soja): la fermentation les rend plus igestes en pré-digéreant les oligosaccharides responsables des flatulences, les glucides et protéines. Il suffit pour cela de les laisser tremper 24h dans de l’eau en ajoutant éventuellement une cuillère à soupe de yaourt et/ou de jus de citron. Pour les légumineuses, changer l’eau après une demi-journée. Puis égouttez le tout, rincez et cuisez comme d’habitude (et même un peu moins longtemps).

Vous trouverez sur ce site plusieurs recettes de boissons fermentées (voir Kéfir et kombucha) et de yogourt sans yaourtière.

Références

lessive au savon

Comment la lessive au savon encrasse le linge

J’en ai utilisé pendant des années et je l’ai même mis au programme de plusieurs ateliers « produits ménagers », persuadé de son efficacité. Pourtant, non seulement la lessive au savon ne marche pas, mais elle encrasse le linge et les machines.

Elle avait pourtant tout pour plaire: bon marché, naturelle, biodégradable et non allergisante. Que demande le peuple? Mais après de nombreuses recherches sur le sujet, nous nous sommes rendus compte qu’elle n’était pas aussi miraculeuse qu’on l’espérait.

Décrassage de linge propre (« laundry stripping« )

C’est en se renseignant sur les lessives à utiliser pour les couches lavables de notre fille que nous avons découvert que la lessive au savon encrassait les fibres textiles. Sur certains sites en anglais, on trouve des témoignages de personnes qui décrassent leur linge propre (« laundry stripping ») en les faisant tremper dans leur baignoire avec des produits chimiques, ce qui résulte généralement avec une eau brunâtre, preuve que des résidus s’accumulent sur les fibres avec le temps.

Pourquoi éviter la lessive au savon?

Le savon est un tensioactif. Il est composé de molécules amphiphiles, c’est-à-dire qui sont composées d’une tête polaire hydrophile (qui aime l’eau) et d’une queue apolaire hydrophobe (qui s’attache aux graisses). Le savon permet donc de se fixer aux saletés et de les rendre solubles dans l’eau pour les évacuer. A priori, il n’y a donc aucun problème, à quelques détails près:

  • Le savon sert à nettoyer des surfaces lisses, et il agit seulement si l’on frotte. Il n’est donc pas fait pour laver du linge en machine, mais peut convenir pour détacher le linge avant lavage ou pour des lessives à la main. Les machines et les programmes de lavage sont conçus pour laver avec des détergents chimiques.
  • La quantité de savon généralement préconisée dans les recettes de lessive au savon est trop faible pour avoir un effet. A raison de 40g de savon par litre de lessive et de 10 cL de lessive par machine, cela revient à mettre 4 grammes de savon pour une machine, soit une cuillère à café. Autant ne rien mettre du tout.
  • Au contact du calcaire ou du vinaigre, la lessive au savon encrasse le linge, la machine et les canalisations.

Pourquoi la lessive au savon encrasse le linge?

D’un point de vue chimique, le savon est un carboxylate de sodium, c’est-à-dire un ion chargé négativement, ce qui donne à la molécule ses propriétés amphiphile (tête hydrophile, queue hydrophobe). Lorsqu’il est en contact avec une eau dure riche en ions calcium (chargés positivement), les ions carboxylates et calcium s’associent pour former des sels de calcium: la « crasse de savon » qui s’accumule dans les siphons. Ces dépôts sont non solubles, c’est-à-dire qu’ils se comportent comme des graisses et se déposent sur les fibres du linge et dans les machines.- ajouter du vinaigre pour adoucir l’eau ne sert à rien non plus car le savon réagit de façon similaire en milieu acide. L’acidité du vinaigre protone les ions carboxylate, ce qui forme un acide carboxylique, lui aussi insoluble dans l’eau.

Comment laver son linge de manière écologique?

J’aimerais sincèrement pouvoir affirmer qu’il est possible de produire une lessive faite-maison, naturelle, biodégradable et bon marché, mais ce n’est malheureusement pas le cas. Certes, il existe des recettes maison, mais tellement complexes que je préfère encore acheter des lessives du commerce qui sont adaptées. Il y a cependant quelques astuces pour laver son linge de manière plus écologique:

1. Fabriquez de la lessive à la cendre

Cette lessive est gratuite et permet de valoriser un déchet abondant. La lessive à la cendre est sans danger pour votre linge ou votre machine. Son pH élevé va adoucir l’eau, désintégrer les taches et les aider à se dissoudre dans l’eau. Elle aura également tendance à solubiliser les graisses en les saponifiant (source: FAO). Par mesure de précaution encore une fois, veillez à alterner votre lessive à la cendre avec des lessives du commerce. Vous trouverez ma recette ici.

2. Achetez une lessive biodégradable

Privilégiez une lessive sans colorants ni parfums car ce sont des produits chimiques inutiles (si ce n’est pour le marketing), toxiques, et potentiellement allergisants. Essayez notamment la lessive Held ZERO, que l’on trouve en magasin bio.

lessive held zero sans colorant ni parfum

3. Réduire les doses recommandées

Nos vêtements sont généralement peu sale. Il n’y a pas besoin de beaucoup de produit pour le laver. On peut par exemple mettre la moitié de la dose recommandée de lessive, avec si besoin une cuillère à café de cristaux de soude, qui va adoucir l’eau et augmenter l’efficacité des détergents.

4. Laver moins souvent

Notre société et notre éducation nous encouragent à laver nos vêtements trop souvent. Selon une étude, « 59 % des personnes interrogées déclarent changer de chemise ou de tee-shirt tous les jours, et 35 % estiment que si elles portaient le même vêtement deux jours de suite cela serait mal perçu dans leur environnement professionnel. » (source: Universités de Genève et de Lausanne) Pourtant, il suffirait de se fier à son odorat avant de mettre un vêtement au sale, ou de l’aérer pour ôter certaines odeurs. Laver, c’est de l’eau, de l’énergie, des détergents, mais aussi du temps.

Que faire avec son reste de lessive au savon?

la lessive au savon encrasse le linge

En tout cas, ne le jetez pas, car en-dehors du lave-linge, le savon est un ingrédient efficace.

  • En attendant de vider votre flacon, vous pouvez continuer à l’utiliser comme lessive en ajoutant une cuillère à soupe de cristaux de soude* dans le tambour. Les cristaux de soude vont adoucir l’eau et augmenter l’efficacité du savon. Cette solution temporaire est à alterner avec une lessive conventionnelle.
  • Vous pourrez aussi utiliser votre lessive au savon là où le savon est efficace: vaisselle, lavabos, robinets, sols, mais aussi vos mains, votre corps, vos cheveux (à condition qu’il ne contienne que du savon et de l’eau).

Conclusion

Encore une fois, le savon reste un ingrédient de base très utile et efficace pour l’hygiène et le ménage. Mais pour les raisons ci-dessus, je ne recommande pas d’utiliser du savon dans votre lave-linge, au moins par précaution. Si le linge peut toujours être décrassé, ce serait dommage d’endommager votre machine.


Update 04.12.19: comme les choses ne sont jamais aussi simplistes qu’on aimerait qu’elles le soient, vous trouverez un avis différent, ou plutôt complémentaire, sur le site de valesa: Faut-il vraiment arrêter de faire sa lessive au savon?

Faire vos produits ménagers vous intéresse? Voici quelques recettes pour démarrer:

Vous voulez nettoyer votre maison de manière écologique? Participez à un atelier ou organisez-en un:

Sources

www.fao.org/3/T0587F/T0587F02.htm
www.detergentsandsoaps.com/soaps-detergents.html
fr.wikipedia.org/wiki/Savon
www.unige.ch/sciences-societe/socio/energiebrochure
www.fortheloveofclean.com/laundry-love/homemade-detergent/

* Attention : ne pas confondre les cristaux de soude (carbonate de sodium, Na2CO3) avec la soude caustique (hydroxyde de sodium, NaOH), qui est corrosive et dangereuse à manipuler.